Lors de l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest de 2014 à 2016, les chaînes de transmission ont été contrôlées grâce à la recherche des contacts, c'est-à-dire l'identification et le suivi des personnes exposées aux cas d'Ebola. Les recommandations de l’OMS concernant un contrôle quotidien des symptômes physiques avec distanciation sociale pendant 21 jours ont été inégalement appliquées et parfois interprétées comme une quarantaine. Des critiques ont été formulées concernant le recours à la coercition et ont remis en question la recherche des contacts pour des raisons éthiques. Cet article vise à analyser les perceptions des cas contacts et l’acceptation du suivi des contacts au niveau du terrain. Au Sénégal, un cas importé de maladie à virus Ebola en septembre 2014 a conduit à placer 74 cas contacts en confinement à domicile avec des visites quotidiennes de bénévoles. Une étude ethnographique basée sur des entretiens approfondis avec toutes les parties prenantes réalisés en septembre-octobre 2014 a montré quatre perceptions principales de la surveillance : une mesure préventive de biosécurité, une suspension de l'activité professionnelle, une stigmatisation attachée à Ebola et une obligation sociale. Les contacts ont démontré des attitudes diverses. Au départ, la plupart des contacts ont accepté d’obtempérer parce qu’ils craignaient d’être infectés. Ils ont adhéré aux mesures nationales de réponse à Ebola et ont apprécié l’empathie manifestée par les volontaires. Plus tard, l’acceptation a été améliorée par l’apport d’un soutien moral, économique et social et par l’absence définitive de toute nouvelle contamination. Mais elle a été limitée par l'impact socio-économique sur la satisfaction des besoins fondamentaux, la peur d'être infecté, la façon dont les membres de la famille des contacts interprétaient le suivi, la confusion des contacts avec des cas d'Ebola et la remise en question de la logique du confinement. L'acceptation était également liée à des aspects individuels, tels que le statut professionnel des femmes et des agents de santé exposés, et à des aspects contextuels, tels que le rôle des médias dans la production sociale de stigmatisation. Les résultats ethnographiques montrent que, même lorsque les contacts adhèrent plutôt qu’ils ne se conforment au confinement par la coercition, la surveillance des contacts soulève plusieurs questions éthiques.