Nous plaidons pour l'ethnomusicologie - l'étude critique de la relation dialogique entre la musique et les contextes qui la définissent - comme l'une des approches de recherche que les humanitaires et les forces de maintien de la paix devraient utiliser pour mieux comprendre les stratégies d'autoprotection des civils pendant les conflits. Les stratégies de protection humanitaire n'ont pas permis d'assurer la sécurité de tous les civils, c'est pourquoi les stratégies d'autoprotection font l'objet d'une attention croissante de la part des chercheurs et des politiques. Il est important que les humanitaires ne se contentent pas d'instrumentaliser les stratégies d'autoprotection, mais qu'ils comprennent les politiques et les logiques qui les sous-tendent. Cet article soutient que l'attention portée à la musique peut aider les humanitaires à comprendre les stratégies d'autoprotection, en particulier parce que la musique peut créer un espace de discussion, même sur des sujets émotionnels ou politiques qui ne peuvent être verbalisés d'une autre manière. En outre, les musiciens ont souvent une autorité qui peut contribuer à façonner les comportements, et les chansons sont souvent utilisées pour partager des stratégies de sécurité. La musique peut également créer des souvenirs importants et des significations sociales autour des stratégies de protection. Cet article est basé sur des recherches menées dans l'État de Warrap, au Sud-Soudan, une région qui a une longue histoire de conflits armés coloniaux et post-coloniaux, de mobilisations militaires et d'interventions d'acteurs de l'aide, ainsi que des normes musicales établies et des stratégies d'autoprotection en constante évolution.